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Trois grandes erreurs fréquentes de gouvernance d’OBNL québécois

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Collaboration de Data Next Step 

Nous avons constaté, au cours des dernières années, que de nombreux OBNL québécois, dans un désir de s’aligner avec les pratiques contemporaines de gouvernances et ainsi mettre en place une gouvernance plus flexible, oublient de vérifier si ces dites pratiques sont conformes avec la Loi qui régit la plupart des OBNL québécois, soit la Loi sur les compagnies, partie III (LCQ). S’il est vrai que la LCQ est un régime poussiéreux qui a besoin de beaucoup d’amour (la première mouture de la LCQ est entrée en vigueur en 1920) et que les OBNL québécois mériteraient mieux en matière de loi régissant leurs activités, il n’en demeure pas moins que les OBNL québécois doivent s’y conformer, à moins qu’elles aient décidé de se constituer en vertu de la Loi canadienne sur les organisations à but non lucratif (Loi BNL). Cette loi, somme toute récente (date d’entrée en vigueur en 2011), permet un meilleur alignement avec les pratiques contemporaines de gouvernances.

 

Quelles sont donc ces trois (3) grandes erreurs de gouvernance des OBNL québécois régis par la LCQ ? :

 
  1. La mise en place d’un conseil d’administration à taille variable

 

Les pratiques contemporaines de gouvernance recommandent la mise en place d’une taille flexible du conseil d’administration (prévoir un nombre minimum et un nombre maximum d’administrateurs) afin de faire évoluer la taille du conseil d’administration en fonction des objectifs et du travail à accomplir.  De nombreux OBNL québécois ont décidé de mettre en place cette bonne pratique de gouvernance.

Il n’est toutefois pas possible pour les OBNL québécois sous le régime de la LCQ d’avoir un nombre variable d’administrateurs. Elles doivent obligatoirement avoir un nombre fixe d’administrateurs établi initialement dans les lettres patentes, puis modifiable par la suite par la demande de lettres patentes supplémentaires ou, plus simplement, par l’adoption d’un règlement à cet effet.

Ceci dit, les OBNL québécois qui ont modifié leurs règlements généraux afin de permettre un conseil d’administration à taille variable contreviennent à la LCQ. Ces OBNL se seraient butés à une fin de non-recevoir du Registre des entreprises du Québec (REQ) s’ils étaient allés au bout du processus de changement de leur nombre d’administrateurs. En effet, tel que mentionné dans le paragraphe précédent, tout changement à la taille du conseil d’administration doit ultimement passer par le REQ via une demande de lettres patentes supplémentaires ou, plus simplement, par l’adoption d’un règlement. À cet effet, le modèle de règlement proposé par le REQ pour changer le nombre d’administrateurs est on ne peut plus explicite. L’OBNL doit indiquer dans le règlement un nouveau nombre exact d’administrateurs, ne laissant aucune place à un nombre variable d’administrateurs. 

La demande de lettre patente supplémentaire ou le règlement concernant la modification du nombre d’administrateurs doivent être présentés au REQ dans les six mois suivant la tenue de l'assemblée au cours de laquelle les changements au nombre d’administrateurs ont été adoptés par les membres.

 
  1. La modification de la taille du conseil d’administration en assemblée générale annuelle 

 

Comme indiqué précédemment, un OBNL peut, par règlement, augmenter le nombre de ses administrateurs ou le réduire à trois au minimum, mais aucun règlement n’est valide ni mis à exécution, à moins qu’il n’ait été approuvé par le vote d’au moins les deux tiers des membres présents à une assemblée générale extraordinaire convoquée à cette fin. En effet, un changement aux nombres d’administrateurs requiert obligatoirement la tenue d’une assemblée générale extraordinaire. De nombreux OBNL québécois font malheureusement l’erreur de faire ratifier par leurs membres présents à une simple assemblée générale annuelle la modification aux nombres d’administrateurs. 

D’ailleurs, tout OBNL qui souhaite modifier son acte constitutif doit demander des lettres patentes supplémentaires ou adopter un règlement pour modifier :

  • son nom;

  • la localité où est situé son siège; et 

  • le nombre de ses administrateurs ;

 

Si les modifications concernent les biens immobiliers ou les revenus en provenant, les pouvoirs et les objets ou les autres dispositions, tout OBNL doit demander des lettres patentes supplémentaires.

La demande de lettres patentes supplémentaires ou le règlement doit avoir été approuvé par les administrateurs de l’OBNL et avoir été ratifié par au moins les deux tiers des membres présents à une assemblée générale spéciale convoquée à cette fin.

 
  1. Le pouvoir de cooptation statutaire du conseil d’administration 

 

De nombreux OBNL québécois prévoient dans leurs règlements généraux qu’un nombre fixe de postes d’administrateurs au conseil d’administration (par exemple deux postes d’administrateurs sur 12) sont cooptés par le conseil d’administration. 

Encore une fois ici, ces OBNL québécois font fausse route. En vertu de la LCQ, tout poste d’administrateur, dont la charge a été déclarée vacante, peut être remplacé et coopté par résolution du conseil d’administration. Le remplaçant ne demeure en fonction que pour le reste du terme non expiré de son prédécesseur. Aucune autre possibilité de cooptation par le conseil d’administration n’est autorisée par la LCQ. Une cooptation automatique d’un nombre précis de postes d’administrateurs contrevient à la LCQ.

En vertu de la LCQ, seuls les membres peuvent élire les administrateurs aux époques, de la manière que l’acte constitutif ou, le cas échéant, les règlements généraux de l’OBNL prescrivent et pour un terme ne dépassant pas deux ans. Le pouvoir de cooptation étant exclusivement réservé pour toute charge devenue vacante au conseil d’administration.

La Loi BNL est plus flexible et prescrit que, dans les cas où les statuts le prévoient, les administrateurs puissent nommer un ou plusieurs administrateurs supplémentaires dont le mandat expirera au plus tard à la clôture de la prochaine assemblée annuelle, à condition que le nombre total des administrateurs ainsi nommés n’excède pas le tiers du nombre des administrateurs élus à la dernière assemblée annuelle.

 

Quoi faire maintenant ?

Si vous faites partie de ces OBNL qui ont mis en place ces grandes trois (3) grandes erreurs de gouvernance, une régularisation de votre situation s’impose à très court terme. Prenons l’exemple d’un OBNL qui a mis en place un conseil de taille variable de neuf (9) à 12 administrateurs. Comme cette taille variable contrevient à la LCQ, c’est la taille prévue dans les lettres patentes qui fait office de taille officielle du conseil d’administration. Si le nombre d’administrateurs prévus dans les lettres patentes de cet OBNL est de  sept (7) administrateurs, par exemple, alors l’ensemble des décisions prises par le conseil d’administration de cet OBNL, à la suite de la mise en place de la taille variable du conseil d’administration, pourrait être déclaré invalide : cet OBNL fonctionnait avec un nombre d’administrateurs supérieur à celui indiqué dans les lettres patentes. 

La mise en place de pratiques contemporaines de gouvernance est plus que souhaitable pour l’ensemble des OBNL québécois. Il faut toutefois s’assurer que ces pratiques sont conformes avec la Loi qui régit les OBNL québécois.

 

N'hésitez pas à consulter un expert en gouvernance qui vous conseillera sur la meilleure façon, à très court terme, de régulariser votre situation (si vous avez mis en place une ou les trois (3) erreurs citées dans cette chronique), et par la suite d’implanter des pratiques de gouvernance contemporaines durables pour votre OBNL.

 

Prendre note que l'information présentée dans cette chronique est non exhaustive et est fournie à titre informatif uniquement. Elle ne constitue pas un avis juridique et ne devrait en aucun cas être interprétée comme tel. Aucun lecteur ne devrait prendre ou négliger de prendre des décisions en se fiant à ce seul contenu.

 

--- publié le 23 mars 2023

Bernard Blackburn, MBA, Adm.A, ASC, C.Dir. 

Stratège, formateur et administrateur de sociétés certifié, Bernard Blackburn est président et conseiller principal en gouvernance, éthique et stratégie chez GUBERNA Services Conseils. Il est également président du comité d'enquête à l'éthique et à la déontologie de l'Ordre des administrateurs agréés du Québec.  Il siège aussi au conseil d'administration d'Option consommateurs où il agit comme vice-président du conseil d'administration et président du comité de gouvernance. Il a été, de 2016 à 2020, président du Réseau d’éthique organisationnelle du Québec. Enfin, il a été, de 2012 à 2014, chargé de cours en gouvernance à l'Université de Sherbrooke.

Monsieur Blackburn compte plus de 25 ans d’expérience en gestion et développement stratégique ainsi que près de 15 ans en accompagnement stratégique de directions générales et de conseils d’administration dans leurs enjeux de gouvernance, d'éthique et de stratégie (Audit/Diagnostic de gouvernance; Optimisation de la performance du conseil d'administration; Actualisation de structures et modèles de gouvernance; Démarche de planification stratégique; Audit/Diagnostic éthique; Programme d'éthique et de conformité; Évaluation du risque éthique; Rédaction et révision de codes, guides et politiques d’éthique et de gouvernance; Conseils et avis éthiques; Actualisation ou identification de valeurs organisationnelles).

Monsieur Blackburn donne également régulièrement des formations en éthique et en gouvernance auprès d'employés, dirigeants et administrateurs. 

 

 

 

 

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